La rénovation de l’immeuble du CSTC se doit d’être un projet exemplaire

Une ambitieuse rénovation, celle de l'immeuble de bureaux du CSTC à Zaventem, vient de commencer. En tant que promoteur de l'innovation technologique dans le secteur de la construction, cette rénovation doit devenir un projet exemplaire dans de nombreux domaines, rénovation énergétique, réutilisation circulaire, mise en œuvre de façades vertes et technologies numériques avancées. On doit la conception de cette rénovation au bureau BOVAArchitects. Les autres partenaires impliqués dans ce projet sont le Bureau Bouwtechniek (support technique à la construction, BIM, contrôle de l'exécution), Daidalos Peutz (physique du bâtiment), Denis Dujardin (paysage), Ney & Partners (stabilité), boydens engineering (techniques et PEB), le Bureau d'Etudes Delta GC (sécurité incendie), Health & Safety Consulting (coordination sécurité) et Bert Leroy (visualisation). L'entreprise générale Vanhout nv est en charge des travaux.

 

Depuis les années 1960, le CSTC est reconnu comme promoteur de l'innovation technologique dans le secteur de la construction. Avec son plan stratégique 'Ambitions 2025', le CSTC souhaite développer davantage sa fonction institutionnelle dans le cadre de l'horizon Construction 4.0 et du Green Deal européen. La demande croissante de formation et d'assistance technique entraîne la création de nouveaux domaines de démonstration et de recherche.



Le projet concerne la rénovation d'un bâtiment datant de 1999. Malgré son âge relativement jeune, il présente des défauts structurels importants en matière de performance énergétique, de lumière du jour, de ventilation et d'acoustique. Une rénovation radicale de l'enveloppe du bâtiment et des équipements techniques s'est donc avérée nécessaire.



Le patio existant sera couvert pour créer un nouvel espace central multifonctionnel. L'atrium servira d'une part d'espace de démonstration de nouvelles technologies et d'autre part, de catalyseur de synergies entre les différentes disciplines.



Afin de refléter l'identité et les ambitions du CSTC, le projet doit devenir un prototype de réutilisation circulaire d'un bâtiment existant. A partir de là, les objectifs de conception ont été formulés en tenant compte de la possibilité de les mettre en œuvre à grande échelle, d'autant plus que le bâtiment existant est révélateur dans son ensemble de défauts architecturaux caractérisant le parc immobilier belge dans sa quasi totalité. Le projet doit donc étudier comment les nouveaux développements technologiques peuvent contribuer à rendre les environnements urbains construits de manière intensive plus résilients aux défis du changement climatique et de l'économie circulaire.



Machina Viriditas

Le bâtiment rénové a été baptisé 'Machina Viriditas'. « La conception comprend trois composants», expliquent Salvatore Bono et Hilde Vandewalle de BOVAArchitects. 

Le premier (la 'machina' de Léonard de Vinci) fait référence à la science appliquée. La recherche technologique, la démonstration et la formation sont les principales activités qui auront lieu dans le bâtiment. Le logo du CSTC réfère explicitement aux études de mécanique et aux recherches mathématiques de Léonard de Vinci. « Ce n'était donc pas compliqué pour nous de baser notre conception sur le concept de la bottega, l'atelier de la Renaissance où les synergies conduisent à de nouvelles applications et inventions », précise Salvatore Bono. Sur le plan spatial, l'atrium central et un intérieur transparent jouent un rôle important dans les relations interdisciplinaires et dans le soutien à une nouvelle façon de travailler. Les zones d'activités de recherche structurées ou de collaboration informelle et créative, individuelles ou collectives, ouvertes à l'interaction publique vs les zones de concertation interne, sont organisées de manière flexible, en partie grâce au concept d'atmosphères acoustiques différenciées développé par Daidalos Peutz.



Le deuxième élément (les 'viriditas' - littéralement 'verdure' - une idée visionnaire d'Hildegard von Bingen) renvoie à une vision holistique de la durabilité. Outre les objectifs en matière d'énergie et de CO2, le Green Deal européen met également l'accent sur la gestion circulaire des matériaux et des processus de production et sur la réintroduction de la biodiversité et de la connectivité dans les environnements urbains existants. « L'idée de la biophilie et le lien entre l'homme et la nature ne sont pas nouveaux », déclare Hilde Vandewalle. « Des pionniers contemporains tels que Ken Yeang, Stephen Kellert, Oliver Heath et Stefano Boeri ont montré par leurs recherches et leurs réalisations que la biophilie joue un rôle essentiel dans la renaissance durable de nos villes. »



Le troisième élément réside dans le fait de générer une image architecturale optimiste (les façades vertes) et une expérience intérieure inspirante (matériaux C2C, transparence et lumière naturelle), non pas comme une approche stylistique prédéfinie, mais comme l'interaction des deux autres paramètres appliqués via une méthodologie de conception rigoureuse et participative.



Le concept des façades vertes

Un premier défi a été l'ingénierie d'une typologie de façade verte adaptée à une application à grande échelle dans le remodelage des environnements urbains. « Les façades représentent une superficie estimée à plus de 50% de l'empreinte urbaine », explique Salvatore Bono. « Outre les toitures vertes, les façades vertes peuvent favoriser de manière significative la réalisation de green corridors et de green stepping stone systems dans les centres-villes. C'est Denis Dujardin qui nous a fait prendre conscience des problèmes d'entretien et de gestion avec les typologies de façades vertes existantes. Il a fallu prévoir des solutions spécifiques concernant l'irrigation, la résistance à la sécheresse des plantes, l'aspect visuel et les coûts de gestion. Le résultat de nos recherches est une façade verte de type SM (substrate module façades), équipée de passerelles. La façade peut immédiatement devenir un laboratoire vertical accessible, dans lequel les activités de surveillance et de recherche peuvent avoir lieu facilement. »



En collaboration avec Ney & Partners, la façade verte a été conçue comme une couche structurelle indépendante, une deuxième 'façade habitable' pour ainsi dire, qui ne surcharge pas verticalement la structure en béton existante avec le poids des réceptacles modulaires (les mini-jardins). En principe, un tel système peut être appliqué aux façades existantes quelles que soient leurs propriétés et leur capacité de charge.



Le cycle de l'eau contribue à la mise en œuvre d'un concept durable. En plus de connecter le réseau d'irrigation au système de récupération d'eau, un système de rétention a été choisi qui divise par deux la consommation d'eau par rapport aux systèmes traditionnels (pas d'évaporation). Sous la couche de substrat des toitures vertes et des mini-jardins, se trouve une couche d'eau permanente, dans des caissons drainants, qui nourrit les plantes par capillarité.



« La façade verte sera un système technologique complexe - une 'machine verte' - dans lequel nous utilisons des composants, des matériaux et des équipements mécaniques spécifiques (certains provenant d'autres secteurs industriels comme l'industrie alimentaire) afin que l'infrastructure verte puisse être gérée de manière optimale », explique Hilde Vandewalle. « Nous nous référons à la métaphore circulaire du bâtiment en tant que 'banque de matériaux' (un ensemble de différentes couches et composants qui peuvent être facilement assemblés, démontés, remplacés ou réutilisés indépendamment les uns des autres) et à l'utilisation de matériaux à longue durée de vie et efficacité. »

La recherche botanique est bien entendu d'une importance fondamentale. Les espèces végétales ont été choisies par Denis Dujardin sur base de différents paramètres tels que l'effet du soleil et de l'ombre, la protection des oiseaux pendant les mois d'hiver et l'aspect visuel global.



L'atrium: une expérience dynamique

La couverture de l'atrium est également un défi technique. Dans ce contexte, on a étudié l'entrée de lumière du jour, la ventilation et l'extraction de fumée et de chaleur. En collaboration avec Daidalos Peutz, une toiture en sheds atypique a été conçue qui, grâce à des choix intentionnels concernant l'orientation, optimise l'interaction avec le vent et le gain solaire et caractérise l'expérience dans l'atrium. Éléments de fenêtre à ouverture automatique, pare-vent aérodynamiques, contre-linteaux réfractant la lumière du soleil dans les couleurs de l'arc-en-ciel, espaces de bureau avec de grandes fenêtres favorisant le contact visuel entre les services, voilà des éléments qui rendent l'espace très varié et ont pour objectif de procurer une expérience inspirante et dynamique.



Une conception sans énergies fossiles

Le bâtiment du CSTC doit être un cas d'école, y compris dans son équipement technique. Une enveloppe performante (façades 0,15W/m²K, toitures 0,10W/m²K, triple vitrage, protections solaires à lattes avec entrée maximale de lumière du jour) est à la base du concept énergétique. Un immeuble de bureaux entraîne également une demande importante de refroidissement. Un premier principe dans ce contexte était de ne pas utiliser de moyens actifs pour répondre à cette demande.



Boydens engineering a choisi de travailler avec un échangeur de chaleur au sol vertical fermé (ou champ BEO) qui remplira alternativement la fonction de producteur de froid et de chaleur. En été, le sous-sol a une température plus basse et la fraîcheur peut en être extraite pour obtenir un refroidissement passif. En hiver, la source de chaleur souterraine peut être utilisée efficacement par des pompes à chaleur géothermiques.



Les plafonds climatiques seront principalement utilisés pour distribuer la chaleur ou le refroidissement dans le bâtiment. Une régulation par zones a été prévue à cet effet et les plafonds climatiques peuvent donc être contrôlés séparément, sur la base de mesures de référence.



La ventilation hygiénique est réalisée par un système D avec récupération de chaleur. Un contrôle étendu de la demande est appliqué à l'ensemble du bâtiment, ce qui permettra d'optimiser le dimensionnement des groupes d'air. De plus, les fenêtres ouvrantes et l'atrium central veillent à une ventilation naturelle conviviale. Enfin, un éclairage LED est prévu partout. Il fonctionnera sur base du contrôle de la lumière du jour afin que le niveau d'éclairage soit adapté si nécessaire.



Une (re)construction orientée vers l'avenir

Le bouwteam voit le chantier comme une phase supplémentaire du processus de recherche qui met en œuvre et doit confirmer les hypothèses de conception. Lors de la mise en œuvre, une participation interactive de tous les acteurs sera donc requise.



Les technologies numériques les plus avancées ont été utilisées pour optimiser le travail du bouwteam et le processus de construction. Des applications BIM, des protocoles standardisés et des plateformes de communication appliquées pour l'échange de données ont été mis en œuvre par le Bureau Bouwtechniek, en concertation avec les chercheurs du CSTC, dans un common data environment (CDE) unique.



Les travaux seront réalisés par l'entrepreneur Vanhout dans un laps de temps limité, grâce à la programmation LEAN. Le démarrage des travaux est prévu en février 2021 et l'ouverture des nouvelles salles de démonstration pour mars 2022.



L'approche prospective du projet du CSTC est conforme à la philosophie et aux objectifs du Green Deal européen. « Il est urgent d'expérimenter et de rechercher des technologies et des applications réalisables pour la transition vers un nouveau modèle de société durable. La question qu'Ashim Sarkis a posé à la récente biennale Archittetura - 'Comment allons-nous vivre ensemble ?' -  est inspirante et provocante, en particulier dans l'ère post-COVID. Le concept de reconciliation–ecology de M.L. Rosensweig (la proposition d'adapter l'environnement urbain pour promouvoir la biodiversité et la circularité écologique sans entraver l'utilisation sociale de l'espace) est un paradigme pertinent pour des projets de rénovation tournés vers l'avenir à l'échelle urbaine et architecturale. La transformation de la ville en un écosystème plus inclusif est donc au cœur de l'agenda du secteur de la construction dans les années à venir », conclut Salvatore Bono.

 


Source: architectura.be